Résultats du 2nd AAP DAPSI : rencontre avec l’un des lauréats, XWiki
Pour son second appel à projet, DAPSI a sélectionné les consortia les plus prometteurs pour résoudre le défi de la portabilité des données en Europe. Les innovateurs à l’origine de ces projets entament maintenant un voyage de 9 mois à bord de DAPSI – Data Portability & Services Incubator, dont Cap Digital est partenaire, afin d’accélérer leurs solutions.
Découvrez les 15 projets soutenus par DAPSI
Il s’agit du second batch de projets soutenus par DAPSI, alors que les projets du premier lot sélectionné en septembre 2020 se rapproche de la fin de sa période d’incubation. Pendant les 4 mois de la phase ‘Booster’ à venir, les cas d’usage présentés par les consortia seront accompagnés afin d’évoluer vers des projets matures, d’obtenir suffisamment de traction pour leur déploiement et d’être déployés sur le marché.
INTEROFFICE par le projet Cryptpad : la brillante idée qui challenge l'interopérabilité des données
Suite à l'annonce des gagnants, nous avons interviewé Ludovic Dubost, PDG et fondateur de XWiki, l'un des gagnants de l'appel à projet avec sa solution CryptPad, et membre de la communauté de Cap Digital
Cap Digital : Bonjour Ludovic, et tout d’abord félicitations pour faire partie de la 2ème phase d’incubation de DAPSI. Pourriez-vous nous présenter la société que vous avez fondée : XWiki ?
Ludovic Dubost : Bonjour, oui bien sûr. Alors, XWiki est une société européenne de logiciels libres qui construit des logiciels de connaissance et de collaboration. J’ai créé la société en 2004 en croyant à l’importance de la souveraineté française et européenne. C’est pourquoi XWiki est une société indépendante, puisque tous ses actionnaires sont des employés ou des ex-employés. A l’origine, XWiki est le nom du premier produit que nous avons construit, un logiciel open-source permettant le partage de connaissances et la collaboration centrée sur la confidentialité. Aujourd’hui, ce logiciel est utilisé par 7 000 entreprises et organisations dans le monde entier.
CAP : Très bien, et pouvez-vous nous présenter la solution qui sera soutenue par DAPSI, CryptPad ?
L.D. : CryptPad est né de notre intérêt pour les problématiques d’édition en temps réel et le développement d’une technologie qui ne nécessite pas le serveur pour gérer la synchronisation de la collaboration. Entre 2015 et 2019, nous avons travaillé sur un projet de R&D, appelé OpenPass, financé par Bpifrance et labellisé par Cap Digital. Commercialisée depuis 2018, CryptPad est une suite collaborative, chiffrée de bout en bout et open-source. CryptPad est construit pour permettre la collaboration tout en gardant les données privées, rétablissant la confiance dans le logiciel. Tout le contenu est crypté et décrypté par le navigateur de l’utilisateur. Cela signifie que les documents, les chats et les fichiers sont illisibles en dehors de la session à laquelle vous êtes connecté, même par nous. Aujourd’hui, notre instance principale ‘cryptpad.fr’ compte plus de 200 000 utilisateurs par mois. Il existe également plus de 700 autres instances.
À cet égard, DAPSI sera l’occasion pour nous de lancer de nouvelles fonctionnalités telles que la conversion de documents, l’importation et l’exportation et de rendre le produit plus compétitif. Nous travaillerons sur les questions de conversion de données en améliorant la technologie WebAssembly que nous avons déjà expérimentée. Celle-ci permettra de convertir depuis et vers différents formats de fichiers, de réaliser des importations massives et de créer une bibliothèque générique pour les logiciels open source. La particularité de nos outils de conversion est qu’ils fonctionneront à 100% dans le navigateur permettant aux utilisateurs de ne pas exposer leur contenu.
Nous souhaitons également mettre en avant la dimension environnementale de CryptPad par rapport à d’autres outils. En effet, comme les fonctionnalités et la conversion fonctionnent dans le navigateur de l’utilisateur, nous avons remarqué que CryptPad signifie également une réduction significative des ressources du serveur.
Next Generation Internet : l'initiative au service des innovations pour l'Internet de demain
CAP : En parlant de DAPSI, ce n’est pas la première fois que vous êtes impliqué dans des projets NGI. Pourriez-vous nous dire ce que l’initiative NGI signifie pour vous ?
L.D. : En effet, en 2019, nous avons reçu le prix Start-up ” Privacy and trust-enhanced technologies ” accordé par NGI. Suite à ce prix, nous avons également bénéficié de différents financements NGI pour développer notre solution. Cet argent public est très important pour nous car nous sommes motivés par le fait de rester indépendants et nous essayons de construire un nouveau modèle économique autofinancé reposant sur un service freemium qui n’implique pas de publicité, de trackers ou tout système permettant d’être suivi sur le web. Ce n’est pas un défi facile à relever, et le financement de NGI a été déterminant pour le développement de CryptPad. Comme NGI est une initiative de la Commission européenne, cela nous a également permis de donner plus de visibilité et de crédibilité au projet et d’être reconnus par de multiples parties prenantes.
PAC : Pour finir, de votre point de vue, que pourrait faire l’Union européenne pour soutenir les innovateurs du web ?
L.D. : La première action à mettre en œuvre devrait être de devenir plus client des entreprises européennes que des entreprises américaines. L’UE et les entreprises européennes devraient faire un effort important pour maximiser l’utilisation des solutions locales, et notamment des solutions Open Source. Un client équivaut à cinq financements publics. De la même manière, les entreprises européennes pourraient consacrer une partie de leurs dépenses à l’écosystème européen et au développement de solutions alternatives au lieu de donner toujours plus d’argent à Google ou Microsoft. Nous avons définitivement besoin d’initiatives plus fortes pour soutenir l’écosystème technologique européen, comme l’initiative GaiaX.
